« Je pourrais vous parler de ma naissance, de ma vie en tant que petite fille dans la banlieue Londonienne, du divorce de mes parents alors que j’avais huit ans, mais ça n’aurait foncièrement aucun intérêt. Ca ne ferait que vous endormir un peu plus sur une vie que je ne trouve pas vraiment passionnante, alors je préfère la mettre en avance rapide et passer directement à ce que nous concerne vous et moi. »

L’histoire commence avec une jolie lettre parcheminée qui arrive un jour d’été. Ce n’est pas le facteur qui l’a déposé dans la boîte aux lettres en compagnie du journal et des factures, mais bel et bien une gigantesque chouette hulotte qui est entrée, un matin, dans la cuisine de Mona Byron en empruntant une des fenêtres ouvertes. Elle a alors fait tomber sa lettre sur la table de la cuisine, pile poil entre les deux occupantes des lieux qui étaient en train de prendre leur petit-déjeuner, avant d’aller se poster à une hauteur raisonnable. Du haut du frigo la chouette pouvait hululer tant qu’elle le voulait pour réclamer une récompense avant de reprendre son chemin, mais surtout, elle pouvait admirer la scène qui se dérouler sous ses yeux.
Mona Byron et sa fille, Asteria, avaient alors cessé tous mouvements. Elles étaient devenues statues de plâtres, fragiles, et peut être même statues de sel friables. Sans prêter vraiment une quelconque attention à la chouette qui réclamait qu’on la sustente. Elles avaient regardé la lettre, puis s’étaient regardé. Mona avait été la plus rapide, et elle avait subtilisé l’enveloppe à l’emprise de sa fille qui s’était, alors, aussi jetée dessus. Elle l’avait décacheté faisant tomber des miettes de cire sèches sur la nappe à carreaux de la table de la cuisine, faisant peu de cas du nom et prénom de sa fille tracée à l’encre noire dans une calligraphie parfaite. Asteria, quant à elle, avait bougonné, puis elle s’était levée pour débarrasser son assiette vide tout en terminant son verre de jus d’oranges pressées, elle se serait après ça assuré de nourrir l’animal impatient si ça mère n’avait pas poussé un cri. Surprise la fille s’était retourné vers sa mère, manquant de lâcher le morceau de pain qu’elle s’apprêtait à donner à l’oiseau.
« Tu es reçue à Poudlard ! Ca y est la lettre est arrivée ! ». Mona tenait la lettre du bout de doigts, l’agitant avec tellement d’énergie qu’on pouvait entendre le papier se froisser au contact de l’air. La nouvelle lui avait presque donné les larmes aux yeux, mais si les larmes ne s’étaient pas mises à couler, elle en avait tout de même profité pour se jeter sur le fruit de ces entrailles, la serrant jusqu’à l’étouffement. « Il faut que j’appelle ta grand-mère, et ta tante, et ton oncle… ». Elle avait ainsi continué à énumérer tous les gens qu’elle devait mettre au courant de ce qu’elle considérait comme une nouvelle extraordinaire. Seulement, dans toute cette histoire, elle en avait oublié la pièce centrale, sa propre fille.
Puis tout est devenu soudainement beaucoup trop rapide, Mona était euphorique, totalement électrisée par l’idée que sa fille allait entrer dans le monde des sorciers. Surexcité à l’idée qu’elle allait enfin devenir une sorcière à part entière. Alors elle l’avait emmené partout, elle lui avait fait tailler ses robes de sorcières et même fait tricoter de jolies chaussettes pour aller avec. La baguette avait été soigneusement choisie, les livres ensorcelés pour ne pas s’abimer à force d’être durement travaillé. Et tout s’était terminé sur le quai de la gare. On aurait alors pu croire que Mona allait faire quelques efforts afin de faire plaisir à sa fille, qu’elle aurait enterré sa mésentente avec son ex-mari pour célébrer la rentrée de son unique enfant. Mais ça n’avait pas été le cas, et Asteria s’était finalement retrouvée seule sur le quai.
Une urgence lui avait on dit, un examen de dernière minute, ou peut-être même une soutenance impossible à reporter, quelque chose de trop important. Si important qu’elle était remontée immédiatement dans sa voiture après avoir placé les bagages de sa fille sur un chariot, elle l’avait laissé là, et la jeune fille avait dû se débrouiller seul, poussant un chariot qui devait faire le double de son poids, se jetant contre un mur qui n’en était pas vraiment un, pour se retrouver seule sur le quai. Astéria avait alors pu regarder avec envie ses familles qui se disaient au revoir, cette joie de partir mêlée à ce déchirement qui tenait de l’amour filiale. Elle, elle ne garderait de cette première rentrée que le souvenir d’une lettre qu’elle n’avait pu lire, d’une mère hystérique, et finalement d’un quai solitaire.

« Un, deux, trois, quatre, cinq… Et toujours rien de bien amusant ! Quand on vous annonce que vous allez intégrer dans l’école de magie la plus important de Grande-Bretagne, vous vous attendez à vivre de grandes aventures, des trucs qui sortent de l’ordinaire… Mais je me suis rendue très vite compte qu’en fait c’est un peu comme partout ailleurs, la magie en plus. »

Les années passent et se ressemblent toutes. Toujours le même quai de gare, 9 ¾, avec toujours les mêmes familles qui se quittaient avec les larmes aux yeux. Les garçons qui étaient là depuis tout aussi longtemps qu’elle qui trainaient avec leurs amis en se moquant des nouveaux qui étaient intimidés, les filles qui poussaient des cris hystériques en se retrouvant devant les wagons du vieux Poudlard Express. Et au milieu de tous ceux-là, elle, elle se retrouvait toujours seule, il n’y avait pas eu une seule année où sa mère avait réussi à l’accompagner jusqu’au quai. Rentrée après rentrée, elle s’était faite à l’idée. Elle avait même abandonné l’idée de rentrer pendant les vacances depuis que cette chère Mona avait oublié de venir chercher sa fille, qui avait alors fait le tour de Londres en Autobus avant de pouvoir rentrer chez elle.
Si Asteria ne pouvait pas compter sur sa mère, son père éternellement absent de l’équation, n’était pas d’un grand soutient. Il se contentait de passer de temps en temps en coup de vent, il avait toujours une nouvelle plante à offrir à sa fille, ou quelques graines dans ces poches. A chaque fois il lui disait d’en prendre soin, et à chaque fois, comme un gag à répétition, Asteria faisait mourir les plantes. Elle n’avait absolument pas la main verte, à croire que même les plantes préféraient mourir plutôt que de supporter sa compagnie, s’en était désespérant.
Alors elle s’était décidé un jour à appeler son père, et lui avait dit que ce n’était plus la peine de lui offrir quoi que ce soit, que sa présence serait amplement suffisante. Il n’avait rien répondu d’autre qu’un simple «je t’aime » avant de raccrocher. Peut être un moyen de se faire pardonner. Peut être un moyen de faire oublier qu’il n’avait pas envie de se rapprocher d’elle. Elle n’en savait rien, et elle préféra oublier l’affaire pour rester souriante face à ce père qui refaisait sa vie, toujours en se présentant comme un botaniste célibataire. Jamais, depuis son divorce, il ne l’avait présenté comme sa fille. Après tout, elle faisait partie d’une erreur d’aiguillage, une erreur impossible à effacer mais qu’il se faisait un plaisir de cacher.
Finalement, entre rester seule chez soi ou rester seule en cours, elle préférait de loin aller à Poudlard. Elle était une jeune fille particulièrement douée pour les études, qui aurait pu en douter d’ailleurs avec deux parents extrêmement brillants dans leur domaine. Elle survolait toutes les épreuves, avait des notes des plus excellentes, et attirait l’attention des professeurs, si bien qu’elle commença à devenir la cible des railleries. On la qualifia de chouchou, de rat de bibliothèque, et ce n’était certainement pas faux. Asteria ne faisait que peu de cas de toutes ces moqueries, elle ne s’abaissait même pas à contredire toutes les rumeurs qui faisait d’elle une lesbienne. Peu importait. Les gens pouvaient bien penser ce qu’ils voulaient d’elle tant qu’on ne venait pas l’ennuyer, ainsi se déroulèrent les cinq premières années à Poudlard. Seule. Toujours seule.

« Sixième année. Tout bascula quand on commença à se rendre compte que j’existais. Je n’étais plus une fille parmi les autres, j’étais devenue la fille bizarre qui se détachait du lot. On a alors commencé à parler sur moi, à murmurer des choses sur mon chemin. »

Tout aurait pu rester ainsi, et elle aurait alors continué à vivre sa petite vie tranquille au milieu des rumeurs et des railleries. Mais si on ne cessait de s’imaginer quelques histoires trépidantes à son sujet, restait-il qu’une toute autre histoire avait pris le dessus. On ne parlait désormais plus que de cette histoire de bonbons ensorcelés qui avaient transformé des moldus en sorciers, c’était une histoire à dormir debout, et certains étaient sceptiques quant à la véracité de ces faits. Mais les choses étaient belles et bien vraies, alors les sorciers de naissances commencèrent à être témoin d’évènements des plus surprenants. On voyait parfois voler des animaux, des vitres qui disparaissaient, et qui réapparaissaient à d’autres endroits, ce n’était foncièrement pas très grave mais assurément des plus perturbant. A Poudlard, on vit aussi arriver de nouvelles personnes, cela ne fut pas vraiment surprenant, il fallait bien donner des cours à ces nouveaux sorciers au lieu de les laisser se balader dans le monde en faisant n’importe quoi.
Cela ne changea pas grand-chose à la vie de Asteria, elle continua tout simplement à vivre sa vie, bien sûr elle fut surprise comme tous les autres, mais finalement après l’histoire des Sangs purs et de celui dont on ne devait pas prononcer le nom, le fait que certains moldus deviennent sorciers rien qu’en ingurgitant des bonbons n’étaient pas si surprenant que ça. Ça pouvait même paraitre intéressant pour certains, une sorte d’évolution naturelle chez les humains, un peu comme une mutation quelque peu forcée comme on pouvait le voir dans certains films Hollywoodiens. C’était une affaire à suivre des plus trépidantes.
Mais à dire vrai, si cette mésaventure qualifiée de très grave par le ministère de la magie, n’eut aucune incidence sur sa vie, ce qui changea vraiment dans sa vie c’est quand elle fut dans l’obligation de mettre sa cervelle au service des plus démunis en matière grise. A croire que le monde tout le monde lui en voulait. Oui, tout le monde souhaitait certainement sa mort dans un sens, surtout en la mettant en relation avec les gros balourds sans cervelle. Leur simple présence dans la même pièce pouvait s’avérait être un supplice alors qu’en serait-il quand elle devrait s’asseoir en leur compagnie à une table de la bibliothèque pour leur expliquer les théorème de merlin ou pire, les sorts de lévitation. Un véritable rêve à venir !