Lexzandra Waintrop. La génitrice. 
« Je ne voulais pas de cette enfant, qu'on se le dise. Je ne suis pas faite pour être mère, et mon ex-mari ne pourra qu'être d'accord avec ça. Elle braillait dès qu'elle est sortie de mon ventre. Une vraie peste. Je l'ai detestée: elle avait deformé mon corps pendant neuf mois. NEUF MOIS! Son père, cet abruti, n'était même pas là, il est arrivé en retard, comme toujours. J'ai appelé cette gamine Alice Enola pour que jamais personne ne puisse faire d'elle quelqu'un de faible. Enola, c'est le nom de l'avion qui a bombardé Hiroshima et Nagazaki, vous savez, en 1945. Pour moi, ma fille devait être forte: elle ne se laissera pas imposer de volonté, ni soumettre, elle devra être..explosive? Sans mauvais jeux de mots, pardonnez-moi. Et ce sera grâce à moi, quoi qu'elle en dise. C'est ce que je voulais pour ma fille, et je l'ai élevée à ma manière, jusqu'à ses six ans. Là, son père est venue la chercher, out of the blue, comme s'il avait tous les droits. Il a dit que j'étais la pire femme qu'il lui ai été donné de rencontrer, et qu'il se demandait comment le seigneur m'avait donné le droit d'enfanter. Il a été prouvé que les coups aident à l'éducation: j'ai été élevée de cette manière et je n'en suis pas morte. Il faut frapper pour que ça rentre. Comme pour les chiens. »

La mère d'Enola n'avait pas la fibre maternelle. C'était tout juste si, justement, elle ne traitait pas Enola comme un vulgaire chien. Une bâtarde. Conçue hors mariage, hors des lois de l'église. Dans le péché. La faute. Elle l'a élevée jusqu'à ses six ans, dans un luxueux appartement de Londres, parce qu'il lui était impossible de faire autrement. Avorter était hors de question: c'était impropre à la famille de cette femme pieuse et rigide. Descendante d'un aristocrate fortuné, sa mère vivait pour l'argent et l'éducation de cette gamine ingrate qui pleurait à chaque petite frappe sur son joli visage de poupon. Elle rejetait sur elle toute la haine qu'elle avait pour son père. Alternait entre amour débordant et période de violence psychotique. Jusqu'à ce jour là, ce jour terrible où, emportée dans sa colère, dans l'aveuglement, elle avait frappé Enola jusqu'à ne plus s'arrêter. Jusqu'à ce que, inerte sur le sol, Enola cesse de pleurer, cesse de crier, jusqu'à ce qu'elle soit inconsciente. C'est le majordome qui l'avait trouvée, baignant dans son sang, en plein milieu de sa chambre. Exactement là où Lexzandra l'avait laissée, une fois qu'elle en avait fini. Elle avait six ans. Les côtes brisées, une épaule démise, un bras, et son nez cassés, sa lèvre ouverte, une hémorragie interne dont elle garde une cicatrice sur le côté de l'abdomen et à un certain nombre d'endroits. Celle de l'opération. Celle où elle a frôlé la mort. Elle avait passé un mois et demi à l'hôpital, par la suite, sous surveillance policière. Un homme, en uniforme et tout et tout. Enola ne voulait pas avoir affaire à des femmes. La seule personne qui pouvait l'approcher était ce policier qui avait été devant sa porte vingt-quatre heures sur vingt-quatre pendant un mois et demi. Un mois de silence, un mois de rage intérieure. Où elle avait sourit à peu près autant de fois qu'elle avait pleuré: c'est à dire jamais. Elle n'en voulait pas vraiment à sa mère. Juste à elle. De ne pas être assez forte. D'être la victime. D'être celle qu'on peut frapper, parce qu'elle était sale, parce qu'elle était insolente, parce qu'elle n'était pas assez bien. C'était comme ça. Mais ça ne le serait plus jamais. Elle avait juré ça, sur ce qu'elle avait de plus précieux: sa fierté. Elle n'avait jamais vraiment compris ce qui déclenchait de tels accès de rages chez sa mère. Elle avait toujours pensé que c'était ça, l'amour. Puisque c'était la seule chose qu'elle connaissait. Et puis il y avait eu son père.


Etienne Desnos. Le père. 
« Enola est une fille vive. Intelligente. J'ai de la chance, de l'avoir pour fille. La première fois que je l'ai vue, elle avait quelque minutes seulement, j'étais en retard, comme toujours et ils l'avaient déjà mis dans la couveuse. Elle était si...si vivante. Si belle. Je l'aimais déjà tellement... Elle criait, dans son petit berceau, criait pour l'attention et l'amour de sa mère qu'elle n'aura jamais eu. Elle s'égosillait. Je crois que c'est le souvenir le plus frappant qu'il m'ait été donné d'elle: ces cris sans fins, le jour de sa naissance, et le refus obsessionnel de Lexzandra de la prendre dans ses bras. Finalement, ça résume bien ce qu'elle a vécu. Elle a passé six ans à crier pour qu'on l'écoute, pour qu'on la sauve. J'ai mis six ans à l'écouter, mais je l'avais déjà entendue. Je crois qu'elle ne me pardonnera jamais pour ça. Moi, en tout cas, je ne me pardonnerai jamais. Enola ne doit sa réussite qu'à elle-même. Ce n'est pas sa mère, ni moi, qui l'avons aidée en quoi que ce soit. Elle ne nous aurait pas laissé faire. Elle est trop fière. C'est peut-être quelque chose qu'elle doit à sa mère. Elle l'a endurcie au maximum. L'a rendue un peu... obstinée. A l'école, lorsque les autres élèves accompagnaient leur parents aux réunions de professeurs, elle prétextait toujours une maladie, ou un dossier trop important pour qu'elle le reporte à plus tard. Je n'avais pas le droit de venir. Quoi que je fasse, je n'ai jamais vraiment fait part de sa vie: elle ne me laisserait faire. Je crois qu'elle n'a plus été capable de faire confiance à quelqu'un, après ce qu'elle a vécu avec Lexzandra. Enola est une fille calme, mais elle sort quelque peu du moule qu'on lui impose. Et c'est tant mieux. Si vous lui proposez quelque chose qui vaut le coup, qui s'apparente de près ou de loin à un défi....elle vous suivra jusqu'en enfer. Et c'est souvent le cas. »

Ce n'est pas qu'Enola n'aime pas son père. C'est qu'il n'a jamais rien fait pour la sauver. Ce jour là, elle a cessé de s'appeler Alice. C'était le prénom que sa mère lui avait choisi, pour faire d'elle ce qu'elle voulait qu'elle soit. Mais jamais plus elle ne serait cette enfant faible, plus jamais elle ne serait la victime. Peu de personne osaient l'appeler Alice. Peu de personne savaient, en vérité, que son prénom était Alice.  Cette fille là était morte, à six ans.
Avec son père, tout avait été différent. Les premiers mois, surtout, avaient été difficiles: il lui avait fallu apprendre le Français, intégrer une nouvelle école, un nouvel appartement, une nouvelle chambre, partager son quotidien avec quelqu'un qu'elle n'avait vu que trois fois dans sa vie. Et puis lui, il avait refait sa vie. Avec une femme. Et un fils. Le demi-frère d'Enola. Leur relation a toujours été complètement alambiquée. Ils ne s'aimaient pas, pendant longtemps. Et à l'adolescence, un jour, ils se comprennaient, l'autre, ils se haïssaient. Ils peuvent passer une nuit entière dans les bras l'un de l'autre, lorsqu'il y a de l'orage, puis ne pas s'adresser la parole. C'est sans doute Enola, qui a instauré cette relation. Sans le savoir, sans trop le vouloir. A l'amour à la haine. Lui aussi, a mangé des bonbons, ce soir là. Il est là, quelque part, dans Poudlard. Ils sont juste trop différents. Maintenant que la magie coule dans leur veines, ils sont d'autant plus dangereux l'un pour l'autre. Enola n'admettre jamais qu'elle l'aime bien plus qu'un frère, et il n'admettra jamais la protéger plus qu'il ne le faut. Après l'accident Fizwizbiz, ils ne se sont plus adressé la parole. Personne ne sait pourquoi. Mais on entendra parler à nouveau de la fratrie Desnos. Ce n'est simplement pas le moment. (Scénario à venir, cependant)



Matteo. Le demi-frère.
«Enola, c'est un peu la fille qui a l'air brisée. Je crois que la première fois que je l'ai vue, c'était quand mon beau-père l'a ramenée à la maison. Elle avait des béquilles, un plâtre et des hématomes un peu partout. A cinq ans, je trouvais que cette fille était un ovni. Elle marchait, et on aurait dit qu'elle était en noir et blanc quand tout le monde était en couleur. J'ai mis six mois avant d'oser lui parler. Elle se laisse pas faire. Elle attaque comme moyen de défense. Et on a jamais joué ensembles. Jamais. Je la trouvais bizarre, et au final, on s'est ignorés pas mal de temps. Et il y a eu l'orage, il y a deux ans: elle est venue dans mon lit et s'est mise à pleurer, parce qu'elle avait peur.
Je ne saurai pas définir ce qui nous lie. Je crois que nos parents n'ont jamais remarqué. Enfin ça n'a aucune importance, maintenant que nous sommes à Poudlard. Elle va sans doute oublier jusqu'à mon existence ».

Enola a vécu ces dernières années comme on passe un péage. Elle n'était pas renfermée, juste....froide, calculatrice. Et elle avait toujours cette peur des gestes brusques que personne n'a jamais pu comprendre. Que tout le monde faisait semblant de ne pas remarquer. Personne ne l'a vue pleurer. Et Matteo l'a vue. Il lui a parlé. Il a essayé d'aller au delà de son apparente froideur. Au delà de sa méchanceté inconsciente. Mais elle l'a moyennement laissé faire.
Enola est une fille qui aime la vie. Comment fait autrement, après avoir approché la mort de si près? Ça se voit dans son rare sourire, dans ses gestes, sa manière de parler, sa manière de vivre aussi. Pleinement. Comme si chaque jours pouvait être le dernier. Ne lui demandez pas ce qu'elle porte comme sous-vêtements, elle aura déjà oublié. En amitié, comme en amour, elle se laisse gentiment détester, parce qu'il est bien plus facile de tenir les gens éloignés que de les laisser entrer dans sa vie. Lorsqu'elle ne contrôle pas les choses, Enola panique, et lorsqu'elle panique, elle est d'autant plus dangereuse qu'elle en devient férocement violente. Enola déteste son image, et celle qu'elle renvoie aux monde. Ses yeux foncés, froids et perçants, sont aussi beaux que dangereux. On y décèle parfois un grain de folie qui ferait flipper les profiler les plus expérimentés. Elle se tient toujours très droite, le menton très haut, pour cacher qu'elle n'a pas tant d'assurance que ça. Il est plus simple de montrer un côté peste mesquine et cruelle que de montrer ses sentiments. Elle a tendance à dire les choses telles qu'elle les pense sur le moment mais jamais pour les choses importantes. Embrasser un garçon parce que la courbe de ses épaules l'a émue, ou parce qu'un geste maladroit l'a touchée. Se lier avec quelqu'un parce qu'elle lui trouve une certaine détresse, ou parce qu'elle a simplement de l'admiration pour elle. Cesser de parler à quelqu'un pour les mêmes raisons. Bouder. Aimer. Haïr, le plus souvent. 



Professeur de Poudlard ayant préféré rester anonyme. 
« Enola est une fille intelligente et calculatrice. Oui. Je crois que la première fois que je l'ai rencontrée, j'ai été surpris d'apprendre qu'elle faisait parti de la génération Fizwizbiz. Je ne m'attendais pas à quelqu'un d'aussi...sceptique? J'ai vu des élèves sauter de joie, tomber en pâmoison devant Poudlard. Enola, elle avait l'air d'avoir déjà vu cet endroit, d'y appartenir. Elle se fond dans le décor avec une aisance un peu déconcertante. Je n'ai pas été surpris de la voir envoyée à Serpentard. Elle correspond à ce que le monde pense d'eux, qu'on se le dise! Elle a simplement l'agressivité des chiens mis en cage qu'on affame pour les rendre cruels, et qui se jettent sur leur adversaire avec une telle faim qu'ils ne sont plus tout à fait conscients de ce qu'il font. Enola m'a dit ce qui lui été arrivé. Elle me l'a dit comme ça, d'un coup: « Ma mère a tenté de me tuer ». Elle a l'air de refuser de prendre ça comme une excuse pour ce qu'elle est. Et elle sait que c'est à cause de ce qu'elle a vécu qu'elle est devenue ce qu'elle est... Elle n'est pas folle, mais parfois, je me dis qu'elle est juste dangereuse. J'ai travaillé à Sainte Magouste, vous savez? Je sais en reconnaître un fou quand j'en vois un, mais elle...elle est juste dangereuse, elle me fout la frousse. Elle vous fixe...elle vous fixe et elle rigole, et vous, vous avez peur....Peur d'elle et de son foutu rire de gamine...  "