Premier cours face à ses idiots d'élèves. Premier cours d'une année interminable, entouré d'une horde de trolls torturés par leurs hormones. Alors certes, tous ne l'étaient pas, les premières années arrivaient en général à regarder au tableau. Mais à partir de la quatrième année c'était une vaste blague. Plus préoccupés à imaginer leurs voisines sans sous-vêtements qu'à écouter ses passionnantes remarques sur la métamorphoses de l'infiniment grand, ces primates boutonneux lui faisaient vivre un calvaire. Non pas qu'il manquât d'autorité! Non pas du tout, il régnait toujours un silence de mort dans sa salle de classe mal éclairée, mais les devoirs qu'on lui rendaient étaient toujours proches du néant. C'était cette médiocrité qu'il reprochait à ses étudiants. Lui n'avait jamais été un élève idiot. Il avait toujours brillé, quelque fut la matière. Toujours premier de sa classe à faire pâlir d'envie Hermione Granger. Celui lui avait valu quelques ennuis avec ses petits camarades, des croches-pied pour les plus barbares jusqu'aux pétards sorciers dans son caleçon. Mais il ne s'était jamais abaissé à céder à ses plaisanteries de bas étages. D'ailleurs, verbalement, il avait toujours été imbattable. Son esprit cynique et un peu psychotique l'avait toujours fait briller dans ce genre d'exercice. Bien que sa stature de crevette naine l'empêchait d'aller trop loin.

Mais maintenant qu'il était professeur, aucun de ses étudiants n'avaient oser l'agresser de cette manière. Sans doute parce qu'il avait comme rituel de présentation de transformer un chat en cèpe et de promettre qu'il mourrait d'envie de s'exercer sur des humains. Oui, il pouvait le dire, ses élèves avaient beau le haïr, ils le craignaient aussi, lui et les notes cataclysmiques qui délivrait sans états d'âme.

Quant à ses collègues... là aussi s'était une vaste plaisanterie. A croire que le directeur avait pioché dans son carnet d'adresses personnel pour récupérer les pires tocards que le monde sorcier pouvait compter. Leon avait toujours été habitué à être plus intelligent que la moyenne - sur doué de naissance - mais là, cela frisait le gouffre entre ses propres compétences et celles de ces adultes à peine plus futés que leurs étudiants. D'ailleurs, contrairement à eux, Leon n'avait jamais sympathisé avec aucune de ses demi-portions. Il faisait partie de ces vieux professeurs qui vouvoyaient toujours et qui gardaient leurs distances. Il n'était ni leur ami ni leur assistante sociale.

En rentrant dans sa salle de cours, Leon se sentit presque à l'aise. Quelques unes de ses plantes carnivores broyaient joyeusement le dioxyde de carbone en dodelinant de leurs pétales. Il les avait toujours adoré ces bêtes-là. Elles ne piaillaient pas des choses ineptes, comme des paroles ou des miaulements lancinants. Elles se contentaient de dévorer ce qui leur tombait dans les dents. Leon en cultivait depuis toujours. C'était sa mère qui l'avait initier. Assis sur ses genoux lorsqu'il était enfant, il regardait les créatures attraper dans les gueules les araignées, les oiseaux et les chats avec tant de facilité... ce n'était ni cruel ni mesquin c'était absolument impitoyable. Un spectacle magnifique, cela allait sans dire.

Sur son bureau, auquel il prit place, se trouvait un épais grimoire, de l'encre et des craies - panoplie du parfait petit prof. Et dans son tiroir, à l'abri des regards indiscrets il y avait deux photos. Celle de ses parents et lui même qui faisaient tous la gueule, comme à leur habitude. Famille de surdoués qui se comprenaient sans mots, qui détestaient tous la médiocrité de la banalité, les insectes volants et surtout les moldus. Une vraie famille de sorciers pur jus qui toisaient le monde d'un regard noir au fond de leur vieille demeure perdue dans une zone équipée de repousses-moldus. L'autre photographie représentait une jeune fille au regard triste qui regardait par la fenêtre. Elle était belle, tout simplement belle. Ses cheveux bruns étaient ramassés dans un chignon élégant et sa mélancolie noble emplissait le portrait l'élégance et de pureté. C'était Béline. La seule femme qu'il ait un jour aimé et qui l'avait quitté pour un abruti de joueur de Quidditch. Lui qui avait toujours détesté le sport sous toutes ses formes s'était fait abandonné par la femme idéale - sa fiancé! - qui avait préféré se tourner vers ce gorille dégénéré à l'arcade sourcilière fracturée par quelques cognards bien lancés. Oh comme il aurai aimé être un batteur et s'acharner sur cet hurluberlu. Il lui avait fait payé au centuple cette humiliation. S'il avait pu le faire, Leon l'aurait maintenu le visage au-dessus de ses plantes carnivores jusqu'à ce qu'elles puissent lécher l'intérieur de son crâne sans cerveau.

Béline. Leon refermait son tiroir comme pour y enfermer ce souvenir dont il ne pouvait se défaire. La seule créature pour laquelle il avait un jour eu un quelconque intérêt l'avait quitté. Depuis ce jour, Leon ne s'était plus intéressé à d'autres femmes. D'ailleurs, leur rupture ne datait pas de plus d'un an.

La porte du couloir s'ouvrit sur un flot d'élèves. Leon fit la grimace en sachant que parmi eux il y avait des élèves qui n'auraient pas du être là. Non seulement des Sang de Bourbe qui colonisaient Poudlard depuis des générations mais surtout ces immondes moldus. En dehors de l'école, Leon n'avait jamais rien eu contre les moldus. Ils étaient presque exotiques. Mais contre ces usurpateurs c'était différent! Ces idiots dont le seul mérite était d'avoir mangé des bonbons ensorcelés comme l'aurait fait un chien mal dressé! Pourquoi ne pas enseigner la métamorphose aux Trolls! Et l'Histoire aux fées pendant qu'on y était! Faites donc un dortoir pour les centaures auprès tout ils sont à moitié humains! Cela le faisait vomir. Bientôt, dès que ces intrus commenceraient à leur rendre leurs copies, ils allaient comprendre leur douleur. Des T, des D et des P les jours de bonnes humeurs. Mais cela, croyez moi, n'allait pas arriver de si tôt!